La schizophrénie a été déstigmatisée à Porrentruy

Dans le cadre des 21es Journées de la schizophrénie, l’association jurassienne de proches aidants A3 Jura organisait la semaine dernière des rencontres dans les locaux de l’UAP, à Porrentruy, pour déstigmatiser la maladie.
Dessin de l'artiste Laurent Voirol, usager des prestations de l'Etablissement de soins socio-réhabilitation, orientation et rétablissement (ESSOR) de l'Unité  d'accueil psycho-éducatif (UAP) à Porrentruy.
Dessin de l'artiste Laurent Voirol, usager des prestations de l'Etablissement de soins socio-réhabilitation, orientation et rétablissement (ESSOR) de l'Unité  d'accueil psycho-éducatif (UAP) à Porrentruy.

Œuvre de Laurent Voirol, usager des prestations de l’Établissement de soins socio-réhabilitation, orientation et rétablissement de l’Unité d’accueil psycho-éducatif à Porrentruy.

Josué Merçay
Josué Merçay
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L’époque n’est si lointaine où les personnes souffrant d’une maladie mentale étaient enfermées, entravées par une camisole de force, subissaient des traitements expérimentaux. Aujourd’hui, leur prise en charge a complètement changé, mais les idées reçues sur les troubles psychiques ont la vie dure: dangereux, fous, à enfermer… C’est donc prioritairement dans l’optique de déstigmatiser la maladie que sont organisées depuis plus de 20 ans les Journées de la schizophrénie, événement qui se déroule aujourd’hui dans douze pays.

Peurs et tabous retiennent le public

Au niveau cantonal, A3 Jura, association de familles et amis de personnes souffrant de maladie psychique, a mis sur pied des rencontres la semaine dernière dans l’atelier-boutique Cré’Attitudes de l’Unité d’accueil psycho-éducatif (UAP) à Porrentruy (Grand-Rue 26). En plus de la projection de courtes vidéos sur les troubles psychiques, malades, professionnels et proches aidants se tenaient à disposition du public pour échanger sur le sujet. Aucun visiteur n’a pourtant poussé la porte de ce lieu de rencontre, ce qui illustre bien les peurs et tabous qui subsistent.

"Si on sait, on peut en parler et ne pas avoir honte de cette maladie du cerveau."

Vendredi après-midi, le groupe prévention de l’UAP était réuni en compagnie de l’éducatrice Pascaline Schmid, de Catherine Corbat, secrétaire de l’association A3, et de deux infirmiers. Les personnes touchées par un trouble n’ont pas hésité à exprimer leur vécu, le poids du regard des autres, leur souffrance, évoquant parfois des choses personnelles: "Les gens ont davantage d’empathie pour ceux qui ont une jambe cassée"; "On nous traite de fainéants, qu’on fait semblant"; "On profite de la société"; "Même dans ma famille, certains ne me parlent plus". Les conséquences des préjugés sont nombreuses et parfois graves, entre des droits pas toujours respectés et la gageure que représente la recherche d’un logement ou d’un emploi pour ces personnes.

Les bienfaits des proches et du groupe

"Les familles sont démunies, a relevé Catherine Corbat. On souhaite leur expliquer, faire de la prévention. Il faut comprendre comment fonctionne la maladie pour pouvoir aider les gens. Si on sait, on peut en parler et ne pas avoir honte de cette maladie du cerveau." Elle a également expliqué le nom de l’association A3, qui renvoie aux personnes impliquées sur le chemin de la guérison, soit le malade, son entourage et les professionnels. C’est que les maladies découlant d’un dysfonctionnement cérébral se soignent, contrairement à ce que beaucoup pensent. Une détection précoce, un traitement médicamenteux adapté et le soutien des proches permettent, dans beaucoup de cas, aux personnes touchées par la maladie d’avoir une vie normale.

Lors de l’échange, les participants ont aussi souligné les bienfaits des ateliers proposés par l’UAP. "Ces rencontres permettent d’avoir une activité sociale, a souligné un participant. Après 2-3 ans dans la solitude, ça fait du bien de rencontrer des gens. On gagne des sourires un peu tous les jours." Un autre a relevé l’apport de l’expérience des autres, dans laquelle il dit se retrouver. Le soutien du groupe et des proches, "mettre des mots sur la souffrance et les émotions", permet de "retrouver de l’espoir", d’éviter les rechutes, a-t-il également été relevé.

La schizophrénie touche 1% de la population

"Le patient est l’expert de sa propre maladie. Il a la connaissance de lui-même et sait ce dont il a besoin, a expliqué Mathieu, infirmier à l’UAP. Le schéma s’est inversé dans la prise en charge. On travaille aussi avec des pairs, soit des anciens patients qui ont retrouvé un équilibre de vie." Cette façon de faire, qui se substitue à la relation hiérarchique soignant-patient, est toujours davantage mise en pratique dans le traitement des troubles psychiques, a appuyé Pascaline Schmid.

En Suisse, environ 1% de la population est touchée par la maladie. Près de 60% des schizophrènes ne se reconnaissent pas comme tels, ce qu’on appelle le défaut d’insight, symptomatique de la maladie.

Des idées reçues rectifiées

La schizophrénie n’est pas un dédoublement de la personnalité.

La maladie n’est pas liée à une mauvaise éducation.

Les personnes atteintes par la maladie sont issues de toutes les classes sociales.

Les malades ne sont pas constamment en hôpital psychiatrique.

Dans de nombreux cas, il y a une bonne évolution de la maladie, allant d’un handicap mineur à la guérison.

Les schizophrènes ne sont pas moins intelligents que les autres.

Les personnes touchées par la maladie ne sont pas plus violentes que la moyenne.


Informations pratiques: sites internet des associations A3 Jura, Schizinfo et PositiveMinders.

Le Quotidien Jurassien

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